Loin d’être terminée, la crise économique et sociale provoquée par la pandémie de Covid-19 a déjà eu un impact dévastateur sur le marché du travail à l’échelle internationale. Les services aux personnes et aux ménages, souvent exclus des dispositifs nationaux, figurent parmi les secteurs les plus touchés sur le court terme.
Conformément aux chiffres publiés par l’OIT le 15 juin dernier, environ 55 millions de travailleurs domestiques ont été significativement impactés par la crise, dont 76% appartiennent à l’économie informelle et ne sont pas déclarés. Malgré les dispositifs mis en place par certains Etats membres, l’Union européenne n’a pas échappé à cette réalité.
Ainsi, selon l’OIT, les travailleurs domestiques non déclarés ont particulièrement souffert des mesures de confinement et de distanciation sociale, qui les ont souvent empêchés de maintenir leur activité. La majorité d’entre eux a vu son nombre d’heures diminuer ou simplement perdu son emploi. Privés de rémunération et de protection sociale, ces travailleurs n’ont que très rarement été représentés par des partenaires sociaux capables de porter leurs droits et leur accès au chômage. Cela a eu pour effet de renforcer leur précarité, et particulièrement celle des femmes, majoritaires parmi les travailleurs domestiques.
Les travailleurs déclarés ont aussi été impactés par le Covid-19. Malgré la baisse de leur activité, ils n’ont pas tous été inclus dans les dispositifs de chômage partiel mis en place par les Etats membres. L’urgence sanitaire n’a d’ailleurs pas tout de suite permis aux travailleurs de se doter d’équipement de protection personnel ou de suivre des formations appropriées pour poursuivre leur activité.
Cela a naturellement eu des conséquences sur l’équilibre des temps de vie au sein des ménages européens. Ainsi, la réduction de services aux personnes et aux ménages combinée à la fermeture des établissements scolaires et de garde d’enfants ont globalement augmenté les responsabilités familiales. Ces dernières ont très souvent été prises en charge par les femmes qui n’ont pas bénéficié des conditions apportées par le télétravail au même titre que les hommes, comme illustré dans ce graphique publié par Eurofound.
A titre d’exemple, 24% des femmes sondées en avril se déclaraient trop fatiguées pour prendre en charge les responsabilités familiales et liées à l’entretien du ménage après le travail contre 20% des hommes. A l’issue d’une période de confinement plus ou moins généralisée au sein de l’UE, ces pourcentages s’élevaient respectivement à 31% et 26%. Les femmes les plus touchées par le manque d’équilibre entre leur vie professionnelle et leur vie privée sont celles ayant des enfants de moins de 12 ans, c’est-à-dire non autonomes. La majorité d’entre elles est âgée entre 35 et 49 ans et pourrait à ce titre bénéficier de services à domicile.
Malgré cela, les femmes ont globalement assumé plus de responsabilités que les hommes durant cette période. Selon le rapport, elles consacraient en juillet 35 heures par semaine aux responsabilités familiales et 18 heures aux responsabilités liées à l’entretien du ménage, contre 25 et 12 heures par semaine pour les hommes.
L’absence de services à domicile de qualité, la fermeture des écoles et des lieux de travail ont progressivement accentué les inégalités entre les hommes et les femmes au sein des foyers. Avant la crise, les femmes consacraient en moyenne 22 heures par semaines à des tâches familiales ou domestiques contre seulement 9 pour les hommes au sein de l’UE selon l’Institut européen pour l’égalité des genres. Il est peu probable que la présence des hommes au sein du domicile ait inversé cette tendance. La crise a renforcé la précarité des parents isolés, dont 85% sont des femmes au sein de l’UE parmi lesquelles 48% sont considérées à risque de pauvreté ou d’exclusion sociale.
Ces différents constats ont conduit EFFE à publier en avril, aux côtés d’EFFAT, EFSI et Uni-Europa, une déclaration commune soulignant le rôle stratégique joué par le secteur durant la crise et appelant les autorités publiques à prendre des mesures concrètes pour le soutenir.
L’hétérogénéité des mesures de soutien aux travailleurs domestiques mises en place par les gouvernements des Etats membres ne permet pas une évaluation globale de la résilience du secteur dans l’UE. Toutefois, dans le cadre du projet Ad-PHS, dont EFFE fait partie, un rapport devrait être finalisé fin novembre 2020 pour identifier les mesures de soutien mises en place par les EM.
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Une Europe sociale aux côtés de tous les domiciles