Le 20 mars, le Parlement européen a accueilli le lancement officiel de Dom&Care Value, un simulateur économique innovant conçu pour aider les décideurs à évaluer le retour sur investissement de l’aide à domicile (indirect care). Cet événement a rassemblé des acteurs clés, notamment des représentants des institutions européennes, des chercheurs et des partenaires sociaux, afin de discuter de la manière dont la formalisation et le soutien au travail domestique et aux soins à domicile peuvent générer des bénéfices économiques, sociaux et en matière d’emploi.
Comme l’a souligné Aude Boisseuil, Déléguée générale de l’EFFE, les défis économiques et sociaux du secteur des services à la personne et aux ménages (PHS – Personal and Household Services) nécessitent une attention urgente. D’ici 2070, le nombre de personnes de plus de 50 ans nécessitant des soins de longue durée devrait augmenter de 21 %, entraînant une forte croissance de la demande de services de soins et d’aide à domicile. Parallèlement, le travail non déclaré représente jusqu’à 50 % du secteur de l’aide à domicile, ce qui entraîne des pertes fiscales importantes, des conditions de travail précaires et des pénuries de main-d’œuvre. Sans politiques structurées, de nombreux aidants informels – principalement des femmes – sont contraints de quitter le marché du travail, aggravant ainsi les inégalités de genre et les pressions économiques.
Selon Jean-François Lebrun, expert en PHS, le simulateur vise à soutenir les politiques de conciliation entre vie professionnelle et obligations de soin, permettant aux individus – en particulier aux femmes – de choisir entre carrière et responsabilités familiales. En Europe, 10 milliards d’heures de travail de soin sont externalisées, soit de manière déclarée, soit via le travail au noir, tandis que 80 % des soins et soutients nécessaires sont encore assurés de manière informelle par les familles. Sans politiques adaptées, ces aidants informels ont des choix limités et font face à une instabilité financière.
Le simulateur Dom&Care Value a été développé pour aider les décideurs à mieux allouer les fonds publics en faveur de l’aide à domicile. Les données mettent en lumière d’importantes disparités entre les États membres de l’UE :
Ce manque de formalisation nuit non seulement aux droits des travailleurs, mais réduit aussi les recettes fiscales et les contributions à la sécurité sociale. En soutenant l’emploi déclaré, les gouvernements peuvent à la fois réduire le travail non déclaré et créer des emplois stables et reconnus dans le secteur.
Les participants ont souligné que Dom&Care Value est un outil concret pouvant être intégré aux processus décisionnels pour aider les États membres à démontrer les avantages de la formalisation du secteur des soins et de l’aide à domicile. En s’appuyant sur des données réelles, le simulateur fournit des analyses claires sur la manière dont des investissements stratégiques peuvent maximiser les retombées économiques et sociales.
Miron Podgorean, membre du cabinet de la Vice-présidente exécutive Roxana Mînzatu, a rappelé que si les avancées technologiques et les plateformes en ligne redéfinissent les marchés du travail, elles risquent aussi d’amplifier le travail non déclaré et la précarisation des travailleurs. Il est donc essentiel d’investir intelligemment dans le secteur du care pour éviter ces dérives.
Aude Boisseuil a insisté sur l’importance du dialogue social pour améliorer les conditions de travail, tout en rappelant que le soutien des États membres est indispensable. Sans protection sociale, les emplois domestiques et de soins à domicile resteront dans l’économie informelle.
Idoia Mendia, députée européenne et hôte de l’événement, a plaidé pour une intégration du secteur des soins domestiques et de l’aide à domicile dans les politiques de l’UE. Elle a souligné que ce secteur représente l’un des défis majeurs que le Parlement européen doit relever. Bien que les politiques de care restent une compétence nationale, l’Union européenne a un rôle clé à jouer. Le soutien aux familles via des subventions et des incitations sociales a déjà prouvé son efficacité économique, en limitant l’impact du vieillissement de la population et en garantissant aux femmes une réelle liberté de choix sur le marché du travail. La collaboration avec la société civile sera essentielle pour faire avancer ces politiques.
Le simulateur constitue un point de départ pour des politiques publiques fondées sur des preuves, aidant les gouvernements et les parties prenantes à évaluer le coût réel et le retour sur investissement des politiques de soin et d’aide à domicile. Les priorités pour l’avenir incluent :
Comme l’a rappelé Marie Béatrice Levaux, Présidente de l’EFFE, les familles ne sont pas encore reconnues comme des acteurs représentatifs dans tous les États membres. Faire entendre leur voix sera essentiel pour intégrer pleinement l’aide à domicile dans les politiques nationales et européennes. Investir dans l’aide à domicile n’est pas seulement une nécessité sociale, c’est aussi une opportunité économique, avec un retour sur investissement mesurable pour chaque euro dépensé.
Le simulateur Dom&Care Value est désormais disponible pour les décideurs, chercheurs et parties prenantes. Nous vous invitons à le tester, à comparer les données nationales et à l’utiliser comme un outil pour élaborer des politiques de soin plus intelligentes et inclusives.