Egalité dans le Care: Promouvoir l’Égalité des Genres à travers l’Aide et les Soins à Domicile

Dans l’Union européenne, 91 % des travailleurs du secteur de l’emploi à domicile sont des femmes. Améliorer la visibilité de ces travailleuses permet en même temps de faire avancer l’égalité des genres.

Les 10 et 11 décembre derniers, EFFE a participé à Bruxelles à la deuxième édition du Forum sur l’Égalité des Genres, organisé par l’Institut Européen pour l’Égalité de Genre (EIGE). Cet événement a réuni des représentants des institutions européennes et de la société civile afin de dresser un état des lieux de l’égalité des genres au sein de l’UE et d’échanger sur les bonnes pratiques pour promouvoir les droits des femmes.

Les discussions ont principalement porté sur les défis persistants et émergents en matière de lutte contre les violences de genre, de renforcement de l’intégration des femmes sur le marché du travail et dans la vie politique, ainsi que sur l’amélioration de la qualité des données pour orienter les décideurs politiques dans l’élaboration des futures législations. À cette occasion, l’EIGE a présenté les tendances et points clés de son Indice d’Égalité de Genre 2024, mettant en évidence les progrès réalisés et les défis à relever.

Selon Hadja Lahbib, nouvelle Commissaire européenne chargée de l’Égalité, de la Préparation et de la Gestion des Crises, la future Feuille de route sur les Droits des Femmes et la prochaine Stratégie Européenne pour l’Égalité de Genre post-2025 devront s’attaquer efficacement aux obstacles persistants, notamment aux inégalités entre les couples en matière d’équilibre entre vie professionnelle et vie personnelle.

Lors de la deuxième journée du Forum, la Déléguée Générale d’EFFE, Aude Boisseuil, est intervenue dans un panel intitulé « Egalité dans le Care : l’Égalité des Genres à travers l’Aide et les Soins à Domicile ». Aux côtés de Vytautas Peciukonis (chercheur à l’EIGE), Claire Champeix (chargée de mission chez Eurocarers) et Lilana Keith (responsable du plaidoyer chez PICUM), elle a échangé sur les enjeux du secteur des soins et de l’aide à domicile, l’intégration des travailleurs migrants et la situation des aidants informels. Cette session, modérée par Mary Collins, Secrétaire Générale du Lobby Européen des Femmes (EWL), a permis de mettre en lumière la nécessité de mieux reconnaître et soutenir ces travailleuses, trop souvent invisibles.

Vytautas Peciukonis a présenté les conclusions clés de l’Enquête EIGE 2022 sur les Soins, qui analyse l’implication des femmes et des hommes dans les soins non rémunérés ainsi que dans les activités sociales et individuelles. Il a particulièrement insisté sur le cas des aidants à forte intensité, c’est-à-dire ceux qui consacrent plus de cinq heures par jour aux soins de longue durée et/ou à l’éducation d’enfants de moins de 12 ans. Ces aidants sont majoritairement des femmes (66 %). La moitié d’entre elles occupent en parallèle un emploi (à temps plein ou partiel) et 62 % perçoivent un salaire inférieur au revenu médian. Cette charge mentale excessive constitue un frein à leur réelle intégration sur le marché du travail.

Aude Boisseuil a quant à elle présenté les chiffres clés du secteur de l’emploi à domicile en Europe, insistant notamment sur les 3,5 millions de travailleurs non déclarés, selon les données de l’Eurobaromètre 2019 (désormais obsolètes et nécessitant une mise à jour). Le domicile étant un lieu de travail particulier, il engendre de nombreuses difficultés, notamment l’absence de mesures de sécurité et de santé au travail, qui impacte directement les travailleuses du secteur. Elle a souligné l’importance des conventions collectives, qui permettent d’améliorer les conditions de travail et de renforcer les droits des travailleurs. Elle a également appelé à une simplification financière et administrative pour les familles. Enfin, elle a mis en avant la nécessité de professionnaliser davantage ces métiers, afin de mieux valoriser les compétences variées que les employées développent dans leur travail quotidien.

Claire Champeix a défini le rôle des aidants informels, c’est-à-dire toute personne qui s’occupe – généralement de manière non rémunérée – d’un proche atteint d’une maladie chronique, d’un handicap ou ayant un besoin de soins de longue durée, en dehors d’un cadre professionnel ou formel. Elle a rappelé que ce sont souvent les femmes âgées qui assument ces responsabilités et qu’elles sont insuffisamment soutenues. Revenant sur la Directive sur l’Équilibre entre Vie Professionnelle et Vie Privée, elle a appelé à davantage d’investissements et d’actions en faveur des soins de longue durée, qui subissent une forte pression démographique.

Enfin, Lilana Keith a exposé les deux principales difficultés rencontrées par les femmes migrantes travaillant dans le secteur de l’emploi à domicile : le manque d’accès à des permis de travail décents et, par conséquent, une difficulté à faire valoir leurs droits (conditions de travail décentes, accès aux soins, etc.). Elle a plaidé en faveur de parcours migratoires plus justes et de l’implication des associations et des représentants des travailleurs migrants dans le dialogue social.

Témoignages et recommandations

« Le secteur de l’aide et des soins à domicile reste fragmenté et invisible malgré son importance. »
Aude Boisseuil, EFFE

« Les femmes aidantes peinent à concilier responsabilités de soin et équilibre entre vie professionnelle et vie personnelle. »
Vytautas Peciukonis, EIGE

« Les femmes réclament un partage équitable des responsabilités en matière de soins, entre soins formels et informels, entre femmes et hommes. »
Claire Champeix, Eurocarers

« Les travailleuses migrantes du secteur des soins sont confrontées à des conditions précaires en raison de permis restrictifs et d’un manque de reconnaissance. »
Lilana Keith, PICUM

Poursuivre l’engagement pour une meilleure reconnaissance du secteur

EFFE remercie l’EIGE et tous les panélistes pour ces échanges enrichissants et pour leurs recommandations concrètes en faveur du secteur de l’emploi à domicile. Nous continuerons à œuvrer pour faire avancer l’égalité des genres dans ce domaine, en nous inspirant notamment des bonnes pratiques nationales et locales.

Nous appelons à une meilleure représentativité des employeurs, des travailleurs et des familles dans les discussions politiques et à la mise en place de mesures financières et administratives incitatives. Il est essentiel que ces travailleuses puissent bénéficier des mêmes droits que les autres travailleurs et que leur rôle soit pleinement reconnu et valorisé.

Vous pouvez revoir l’ensemble de l’évènement ici